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Que valent vraiment les concessions obtenues par Cameron vis-à-vis de Bruxelles ?

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Si Londres a effectivement obtenu des concessions dans plusieurs domaines, il est important de rappeler que c’est par le biais d’un accord intergouvernemental signé sous les hospices du Conseil européen, qu’elles ont été obtenues. Un tel accord ne modifie absolument en rien les traités européens que constitue le droit primaire de l’UE, ainsi que le droit dérivé de l’Union (règlements, directives, décisions, recommandations). 

Quelle est la valeur juridique de cet accord obtenu par Londres ?

Poignée de main entre David Cameron et le président du Conseil européen Donald Tusk
Poignée de main entre David Cameron et le président du Conseil européen Donald Tusk

Le Royaume-Uni bénéfice d’un régime d’option de retrait dans plusieurs domaines au sein de l’UE. Concrètement, Londres a refusé « ab initio » de s’engager à adopter l’euro (1992), à participer à l’espace et l’acquis Schengen (1995), ainsi qu’à choisir de participer ou non à des mesures dans l’espace de liberté, sécurité et de justice (politique commune d’immigration, de visa). Ces régimes d’options de retrait figurent noir sur blanc dans les différents protocoles des traités européens. Ainsi, cette décision, des chefs d’États et de gouvernements, obtenue à la suite de plusieurs réunions du Conseil Européen, n’a rien à voir avec un régime d’option de retrait, puisqu’il s’agit d’un simple accord intergouvernemental, qui ne s’intègre, ni ne change le droit de l’UE. D’autant que cet accord n’est pas passé par la phase solennelle de la ratification des vingt-huit signataires, ce qui ne lui donne pas force contraignante d’un point vu juridique au regard du droit international.

Quelles peuvent être les conséquences de cet accord en cas d’un maitien de Londres dans l’UE ?

Dès lors, si Westminster ou le gouvernement souhaite appliquer cet accord, en instaurant un encadrement des prestations sociales pour les ressortissants européens, tout justiciable européen, qui se verra refuser de telles prestations, pourra contester ce dispostif devant les tribunaux britanniques pour non-respect des traités européens (principe de non-discrimination en fonction de la nationalité). Tenues d’appliquer le droit de l’UE, les juridictions nationales utilisent généralement, le mécanisme de la question préjudicielle, afin de renvoyer le litige devant la Cour de Justice de l’UE (CJUE). Si bien que la CJUE appliquera les traités face à une simple décision prise au Conseil européen. Rien n’empêchera non plus à la Commission européenne, suite au référendum, de saisir la CJUE, pour ces mêmes raisons. La Commission n’étant pas concernée par cet accord et, en tant que gardienne des traités, pourra user de son mécanisme du recours en manquement en cas de violation des traités. Elle est seulement tenue, par cet accord, de présenter des modifications de règlements concernant l’exportation des allocations familiales ainsi qu’à la libre circulation des travailleurs. Ces modifications sont destinées à indexer les allocations familiales sur le niveau de vie de l’État membre où l’enfant du travailleur réside, ainsi que de prévoir un mécanisme d’alerte et de sauvegarde de prestations liées à l’emploi afin de « faire face aux situations caractérisées par l’afflux d’une ampleur exceptionnelle et pendant une période prolongée de travailleurs en provenance d’autres d’États membres« . Ces éventuelles modifications ne garantissent, non seulement pas un encadrement rigide de ces prestations au Royaume-Uni, mais surtout elles seraient applicables à tous les États membres de l’Union. Un accord juridiquement contraignant, modifiant donc les traités et accordant des exemptions au seul Royaume-Uni serait la porte ouverte à des demandes d’exemptions, afin de bénéficier de dérogations dans plusieurs domaines, de la part d’autres États membres (notamment les pays de l’est). Ce qui serait inconcevable vis-à-vis de la vaine et constante politique d’intégration et aux objectifs de stabilité de l’UE.

La décision du 19 février, qui offre plusieurs concessions à Cameron, est davantage un accord politique qu’un engagement juridique. Si Londres veut réellement appliquer cet accord, les britanniques devront sûrement devoir accepter une sortie de l’Union Européenne. Rendez-vous le 23 juin prochain.

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